Nicolas TricaudInstitut des neurosciences de Montpellier - Inserm / Université de Montpellier
Mes recherches
La grande question qui m’a très tôt intéressée est comment l’influx nerveux peut-il se déplacer si vite le long des axones des nerfs et comment un ralentissement de cet influx nous affecte. J’ai obtenu une thèse en neurosciences en 2000 à l’Université de Marseille sur les protéines régulatrices des canaux sodium potentiel-dépendants qui permettent la propagation de l’influx le long des axones. Mais cela restait à l’époque très biochimique et, pour moi, très théorique. Alors j’ai cherché à comprendre comment cela pouvait vraiment se passer in vivo en utilisant des virus qui introduisaient dans les cellules des protéines mutées ou des petits ARN inhibiteurs supprimant l’expression des protéines directement dans l’animal. La mise au point de cette technique sur les cellules de Schwann qui myélinisent l’axone et participent à la conduction rapide de l’influx a été réalisée entre 2000 et 2005 au Memorial Sloan-Kettering Cancer Center de New York city, USA. L’utilisation de cette nouvelle technique a vraiment pris de l’ampleur lors d’un second travail postdoctoral à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zürich (2005-2010). Grâce à des financements ATIP-Avenir, de l’AFM et du Fond National Suisse, j’ai pu développer une équipe à Montpellier en 2011 et j’ai étendu mes recherches à l’axone myélinisé. En 2012-2013 j’ai obtenu une ERC consolidator pour étudier le rôle des mitochondries dans le fonctionnement du couple axone-myéline grâce à des sondes fluorescentes détectant différents paramètres de la physiologie mitochondriale in vivo. J’ai récemment mis en place un programme de recherche translationnelle dont l’objectif est à la fois d’explorer les causes des maladies affectant la conduction nerveuse et de développer des approches thérapeutiques pour ces maladies.
Mon projet ATIP-Avenir
Rôles du facteur de la polarité cellulaire épithéliale CRB3 dans la mise en place de la gaine de myéline du nerf périphérique
De nombreuses neuropathies périphériques acquises ou héréditaires affectant la myéline conduisent à une forte réduction de la qualité de vie des patients. L’objectif du Dr Tricaud est de comprendre les mécanismes de la myélinisation et de la démyélinisation afin de proposer de nouvelles stratégies thérapeutiques pour les neuropathies démyélinisantes. Pour cela il a développé une approche virale permettant la modification des cellules de Schwann produisant la myéline du nerf dans la souris vivante. L’introduction dans ces cellules de protéines mutées ou de petits ARN inhibiteurs supprimant l’expression des protéines cibles permet de comprendre les rôles de ces protéine cibles dans la cellule in vivo. En utilisant cette stratégie Dr Tricaud a cherché le rôle des protéines de la polarité cellulaire de type épithélial lors de la myélinisation. Ainsi le facteur de la polarité épithéliale Pals1 participe à l’épaississement de la gaine de myéline grâce à l’adressage des protéines à la membrane et Dlg1 permet le contrôle négatif de cet épaississement à travers la régulation de la voie NRG1-ERBB2/3-PI3K-AKT. L’objectif du projet ATIP-Avenir était de découvrir le rôle du facteur de polarité CRB3 dans la myélinisation. En effet cette petite protéine transmembranaire impliquée dans le développement et la biologie des tumeurs est exprimée dans la cellule de Schwann au niveau de l’interface avec l’axone. L’équipe Avenir Myéline a découvert que cette protéine participait à la régulation de la longueur de la gaine de myéline, un paramètre essentiel de la vitesse de conduction nerveuse. Dans certaines maladies rares, comme la myopathie Lama2, ces gaines de myéline étant trop courtes la conduction nerveuse se retrouve réduite provoquant une neuropathie couplée à la myopathie. Le mécanisme moléculaire implique l’activation du cofacteur de transcription YAP via la voie HIPPO. L’allongement de la gaine de myéline lors de la myélinisation des nerfs passe par un signal provenant de l’accroissement de la taille corporelle et la protéine CRB3 participe en limitant une activation excessive de cette signalisation. La manipulation de l’expression de CRB3 permet de restaurer la longueur normale de la gaine de myéline dans les souris mimant la maladie Lama2. Cela permet d’envisager une nouvelle approche thérapeutique pour corriger la neuropathie dans cette pathologie.
Nicolas Tricaud est également lauréat ERC Consolidator Grant 2012