Chloé GirardChercheuse à l'Institut de biologie intégrative de la cellule (CNRS/CEA/Université Paris-Saclay)
Chloé Girard se consacre à l'exploration des mécanismes moléculaires régulant la formation des crossovers entre chromosomes homologues lors de la méiose, grâce à des approches de génomiques et d’imagerie super-résolution du vivant. Après sa thèse sur la plante modèle Arabidopsis thaliana à l’INRAe de Versailles (2011-2014) sous la direction de Raphaël Mercier, elle a réalisé son postdoctorat à l'Université de Stanford (Californie, USA) sur le modèle animal Caenorhabditis elegans dans le laboratoire d’Anne Villeneuve. Elle a ensuite rejoint l’Institut de Biologie Intégrative de la cellule (I2BC) grâce à un poste de chargée de recherche au CNRS obtenu en 2019, pour étudier ces mécanismes d’abord chez Arabidopsis grâce à un financement ANR JCJC, puis chez le champignon filamenteux Sordaria macrospora. Ces expériences lui confèrent une connaissance unique des aspects conservés et divergents de la méiose au sein des eukaryotes, et lui permettent d'avoir une vision intégrée des principes de base qui régissent la régulation des crossovers méiotiques.
DYNACO : DYNAmics of CrossOver designation
Les crossovers méiotiques nous rendent uniques. Leur répartition le long des chromosomes dicte quels traits seront réassortis pour créer de nouvelles combinaisons d'allèles uniques sur lesquelles la sélection peut agir. Lors de la méiose, un grand nombre d’intermédiaires de recombinaison sont initiées sur l'ensemble du génome, mais seules quelques-uns d'entre eux aboutissent à des crossovers. Le nombre final et la position des crossovers sont étroitement régulés : le long de chaque chromosome, les crossovers ont tendance à être régulièrement espacés. Ce phénomène, appelé interférence des crossovers, a été découvert en 1914 par Sturtevant et Morgan alors qu'ils dessinaient la première carte de recombinaison chez la Drosophile. L'émergence d'une régulation spatiale nécessite une communication. Mais comment la machinerie de formation des crossing-over communique-t-elle avec les crossovers voisins situés à un demi-chromosome de distance ?
Notre compréhension de la manière dont cette communication s'établit a été entravée par la faible résolution temporelle offerte par la cytologie classique, qui ne nous donne accès qu'à des aperçus du processus. Dans le cadre du projet DYNACO, je développerai des solutions innovantes pour explorer la dynamique de la désignation et de l'interférence des crossovers. En utilisant la microscopie à super-résolution sur tissu vivant, combinée à des outils génétiques et d’optogénétiques révolutionnaires dans un système très accessible, le champignon filamenteux Sordaria macrospora, j'aborderai les questions suivantes : (i) Quelle est la dynamique des facteurs essentiels à la formation des crossovers lors de l’établissement de l’interférence ? (ii) Quel(s) mécanisme(s) sous-tend(ent) la communication entre ces facteurs ? (iii) Quelles sont les répercussions en cas de perturbation localisée de cette communication ?
Le projet DYNACO permettra des avancées fondamentales dans notre compréhension de la formation, de la désignation et de l'interférence des crossovers. Nous confronterons et réconcilierons de nombreux aspects des modèles actuels et développerons notre propre modèle unifié. Ces travaux pourraient également fournir des outils pour la manipulation de la recombinaison, afin d'accélérer l'introgression de caractères sélectifs dans les génomes des variétés d’intérêt.