Apprendre au cerveau à s’adapter à la DMLA
La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est une maladie incurable de l’œil qui atteint la partie centrale de la rétine alors que la vision en périphérie est préservée. Aujourd’hui, il n’existe pas de traitement curatif de la DMLA. Des chercheurs du Centre de Recherche Cerveau et Cognition et du Centre de la Rétine à Toulouse laissent entrevoir de nouvelles méthodes de réhabilitation chez les patients. Dans cette étude parue le 8 janvier 2018 dans Scientific Reports, ils utilisent une méthode d’apprentissage perceptif afin d’induire une réorganisation cérébrale permettant d’améliorer les performances visuelles en région périphérique.
Plus d’un million d’individus souffrent de dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) en France. Cette pathologie visuelle se caractérise par une atteinte de la partie centrale de la rétine, la macula. À un stade avancé, une tache aveugle apparaît au centre du champ de vision, tandis que la vision en périphérie est toujours présente. Les conséquences dans la vie quotidienne sont invalidantes au niveau de la lecture, des déplacements, de la conduite ou encore de la reconnaissance des visages. Le déficit visuel est progressif avec l’âge et affecte généralement la population au delà de 50 ans. En raison de la perte de vision centrale, les patients utilisent leur rétine périphérique en des points privilégiés, appelés lieux rétiniens préférentiels (LRP) pour explorer l’espace. Aujourd’hui, il n’existe pas de traitement de la DMLA, mais seulement des thérapies visant à freiner sa progression.
De récentes études en neurosciences ont montré qu’il est possible d’utiliser une méthode d’apprentissage perceptif pour améliorer les fonctions visuelles centrales dans le cas de pathologie comme la myopie, la presbytie ou l’amblyopie. En relation avec le Centre de la Rétine du CHU de Purpan à Toulouse, les chercheurs ont appliqué cette approche à la région périphérique du champ visuel, notamment au niveau des zones LRP chez les patients qui ont totalement perdu l’usage de leur vision centrale. Sur une période de 2 mois, les patients ont suivi plusieurs séances d’entrainement durant lesquelles ils devaient détecter certaines propriétés visuelles d’objets présentés de façon répétitive sur un écran. L’idée est de forcer le cerveau à améliorer progressivement les performances perceptives en région périphérique de la macula et d’essayer de les étendre à la région centrale privée d’informations visuelles en induisant une certaine plasticité cérébrale, c’est à dire une capacité du cerveau à se remodeler pour retrouver une partie des fonctionnalités perdues.
Les résultats de ces travaux financés par la Fondation de France (Fouassier) et la Fondation de l’Avenir, montrent des réductions de seuils perceptifs de contraste de luminance, en d’autres termes une meilleure acuité des objets perçus, suite à l’apprentissage chez les patients. Les mécanismes cérébraux connus pour gérer ces seuils suggèrent fortement que des modifications de certaines propriétés locales cérébrales ont lieu sous l’effet de l’apprentissage perceptif qui induirait ainsi des réorganisations corticales partielles. Une étude en imagerie (IRM) en cours devrait apporter des compléments sur ce point.
Il s’agit là d’une première étape prometteuse de collaboration entre recherche fondamentale et recherche clinique dans le domaine de l’ophtalmologie pour développer des méthodes de rééducation afin d’améliorer les performances visuelles et donc l’autonomie des patients DMLA.
En savoir plus
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Spontaneous and training-induced cortical plasticity in MD patients: Hints from lateral masking.
Maniglia M, Soler V, Cottereau B, Trotter Y.
Sci Rep. 2018 Jan 8;8(1):90. doi: 10.1038/s41598-017-18261-6