Découverte d’un mécanisme d’accumulation du carbone chez les plantes
Grâce à la photosynthèse, les plantes fixent le CO2 en composés organiques au niveau des feuilles. Le malate, un acide organique, joue un rôle clé dans les processus de stockage du carbone et la régulation de la transpiration foliaire. Des protéines spécialisées facilitent le transport du malate dans et entre les cellules végétales. Dans un article publié dans Nature communications, des scientifiques révèlent la structure et le fonctionnement d’un de ces canaux. Ces résultats ouvrent de nouvelles possibilités pour comprendre les processus cellulaires qui permettent la fixation du carbone par les plantes.
Rôle du malate chez les plantes
Les plantes captent le dioxyde de carbone (CO2) atmosphérique à travers des pores microscopiques appelés stomates, situés à la surface des feuilles. Grâce à la photosynthèse, elles transforment le CO2 en matière organique dans les cellules du mésophylle, cellules qui se trouvent dans le tissu interne des feuilles et qui contiennent des chloroplastes, siège de la photosynthèse. Les composés carbonés produits fournissent les éléments nécessaires à la biosynthèse des molécules biologiques et à la production d’énergie métabolique.
Le malate, un acide organique, représente une fraction importante du carbone fixé dans les feuilles des plantes terrestres. Il est produit pendant la journée et stocké dans la vacuole, un compartiment subcellulaire qui occupe la majorité de l’espace cellulaire. Durant la nuit, le malate stocké dans la vacuole participe à la respiration cellulaire. Au niveau des stomates, le malate aide à contrôler la transpiration foliaire en participant à la régulation de l’ouverture des pores stomatiques pour répondre aux variations des conditions environnementales.
Le transport du malate et les canaux ALMT
Le malate est donc une molécule clé qui circule entre la vacuole, le cytoplasme et d’autres compartiments subcellulaires et la circulation de cet acide organique est essentielle au fonctionnement du métabolisme cellulaire. Malgré l’importance de ces flux, les mécanismes permettant le transport des acides organiques, dont le malate, vers la vacuole sont restés peu connus jusqu’à présent. Une famille de canaux ioniques spécifiques des plantes terrestres, les ALMT (Aluminum Activated Malate Transporters), joue un rôle important dans le transport du malate dans les cellules. Cependant, l’organisation moléculaire et tridimensionnelle de ces canaux ioniques localisés dans la membrane vacuolaire des cellules végétales n’était pas connue.
Structure et fonction des canaux ALMT
Dans un article publié dans la revue Nature Communications, les scientifiques ont cherché à comprendre les bases structurales et fonctionnelles des canaux ioniques de la famille des ALMT. Ils ont révélé la structure de AtALMT9, un canal ionique localisé à la membrane vacuolaire de la plante modèle Arabidopsis thaliana, et ont identifié plusieurs configurations. En combinant des approches de biologie structurale qui permettent de reconstruire la structure à l’échelle atomique, ainsi que des méthodes d’imagerie et d’électrophysiologie permettant d’accéder aux propriétés fonctionnelles, les scientifiques ont mis en évidence les caractéristiques biophysiques des configurations ouverte et fermée d’AtALMT9. Ils ont découvert comment ce canal réagit aux variations du potentiel électrique transmembranaire, interagit avec les ions qu'il transporte et s’active en présence de faibles quantités de malate pour transporter des ions inorganiques comme le chlorure.
De plus, les scientifiques ont identifié un mode de régulation surprenant d'AtALMT9 par les lipides de la membrane vacuolaire, qui peuvent accéder partiellement à l'intérieur de la structure grâce à une ouverture latérale. Ces résultats dévoilent les bases structurelles du transport du malate, une molécule clé pour le stockage du carbone dans les cellules végétales. Ils ouvrent de nouvelles perspectives pour comprendre les mécanismes moléculaires régulant le transport des métabolites impliqués dans la fixation du carbone, et offrent de nouveaux leviers d'action pour réguler les échanges gazeux entre les feuilles et l'atmosphère dans un contexte d'adaptation aux changements climatiques.

Figure : Structure moléculaire du canal ionique végétal AtALMT9. Il s’agit d’une protéine présente dans la membrane vacuolaire des cellules végétales qui régule le transport d’acides organiques comme le malate entre les compartiments intracellulaires et qui, de cette façon, participe à la régulation de la fixation du carbone par les réactions photosynthétiques. A. Structure moléculaire de AtALMT9 dévoilée par cryomicroscopie électronique, la région du canal ionique par où les ions passent est représentée en différentes configurations. B. Vacuole de cellules végétales équipée d’une électrode de patch-clamp permettant d’étudier les propriétés biophysiques in situ de AtALMT9. C. Illustrations de différentes configurations de AtALMT9 telles qu’observées expérimentalement.
Référence : Structural basis for malate-driven, pore lipid-regulated activation of the Arabidopsis vacuolar anion channel ALMT9. Lee, Y., Demes-Causse, E., Yoo, J. et al.
Nature Communications, 20 février 2025, DOI : https://doi.org/10.1038/s41467-025-56940-5
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