Un dérèglement du système immunitaire mis en évidence dans l’épidermolyse bulleuse dystrophique récessive
L’Épidermolyse bulleuse dystrophique récessive est une maladie génétique rare et sévère affectant la peau et entraînant de graves complications. Dans un article publié dans Nature Communications, des scientifiques révèlent un dysfonctionnement immunitaire chez les patients, ouvrant la voie à de nouvelles approches thérapeutiques pour améliorer la qualité de vie.
Épidermolyse bulleuse dystrophique récessive : une maladie rare aux conséquences graves
L’Épidermolyse bulleuse dystrophique récessive (EBDR) est une maladie génétique rare et sévère, causée par des mutations du gène COL7A1, qui entraîne une absence de collagène de type VII dans la peau et les membranes muqueuses. Ce collagène est essentiel pour maintenir l'intégrité de la peau. En son absence, la peau devient extrêmement fragile et sujette à des cloques. Outre les problèmes cutanés, l’EBDR peut entraîner d'autres complications graves, comme des contractures musculaires, un rétrécissement de l'œsophage, des difficultés de nutrition, une anémie, et parfois des cancers cutanés.
Malgré les efforts considérables pour trouver un traitement, il n’existe à ce jour aucune thérapie capable de remplacer efficacement le collagène de type VII. Cependant, dans une étude récente publiée dans Nature Communications, les scientifiques mettent en lumière un autre aspect de la maladie : un dysfonctionnement du système immunitaire.
Dysfonctionnement immunitaire : une nouvelle piste pour comprendre l’EBDR
Cette étude a montré que, chez les patients atteints d’EBDR, le système immunitaire ne fonctionne pas correctement. Les cellules T, responsables de la défense contre les infections, et les cellules tueuses naturelles (NK), qui combattent les cellules anormales, sont souvent activées de manière excessive ou dysfonctionnelle. Ce dysfonctionnement immunitaire contribue à une inflammation chronique, ce qui aggrave les symptômes de la maladie et peut entraîner des complications supplémentaires comme des infections récurrentes et des troubles auto-immuns.
L’immunologie des systèmes est une approche globale du système immunitaire qui considère l’ensemble des interactions entre les différentes composantes du système immunitaire et les autres systèmes de l’organisme. En utilisant cette approche, les scientifiques ont mis en évidence une signature inflammatoire spécifique. Celle-ci se caractérise par l’activation des lymphocytes T effecteurs, un type de globules blancs qui joue un rôle clé dans la réponse immunitaire adaptative et la dysfonction des cellules tueuses naturelles, un autre type de globules blancs appartenant à la réponse immunitaire innée. Cette signature est associée à un profil lipidique globalement pro-inflammatoire.
Prendre en compte la dérégulation du système immunitaire pour améliorer la vie des patients
Les modèles prédictifs basés sur l’intelligence artificielle montrent que l’EBDR s’étend au-delà des symptômes cutanés, avec un endotype systémique complexe, marqué par une hyper-inflammation et une dérégulation immunitaire. En croisant le phénotype clinique avec l’endotype immunologique, l’étude ouvre la voie à des interventions qui, bien qu’elles ne puissent pas guérir la maladie, pourraient améliorer la qualité de vie des patients. Ces découvertes soulignent l'importance de traiter l’EBDR non seulement comme une maladie de la peau, mais aussi comme une pathologie qui affecte également le système immunitaire, avec des répercussions systémiques.
En caractérisant ces mécanismes sous-jacents, les scientifiques ouvrent la voie à de nouvelles stratégies thérapeutiques, qui pourraient cibler l'inflammation et rééquilibrer la réponse immunitaire. Ces traitements offriraient un soulagement de la souffrance des patients en attendant que des thérapies géniques permettent de corriger définitivement la cause de la maladie.
Ces avancées laissent entrevoir une prise en charge plus efficace de l’EBDR, en apportant des solutions ciblées à la fois pour les symptômes cutanés et les troubles immunitaires associés.
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Figure : Imagerie spatiale de masse d’une biopsie cutanée montrant une infiltration massive de cellules immunitaires chez un patient atteint de la maladie EBDR (à gauche). Analyse combinée par cytométrie de masse des populations cellulaires du sang périphérique, mettant en évidence des modifications des clusters de cellules immunitaires, témoignant soit d’une activation, soit d’une dysfonction cellulaire (à droite).
En savoir plus : Systems immunology integrates the complex endotypes of recessive dystrophic epidermolysis bullosa. Nell Hirt, Enzo Manchon, Qian Chen, Clara Delaroque, Aurelien Corneau, Patrice Hemon, Safaa Saker-Delye, Pauline Bataille, Jean-David Bouaziz, Emmanuelle Bourrat, Alain Hovnanian, Helene Le Buanec, Fawzi Aoudjit, Hicham El Costa, Nabila Jabrane-Ferrat, Reem Al-Daccak.
Nature Communications, 14 janvier 2025, DOI : 10.1038/s41467-025-55934-7
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