Sans la protéine Tono, la drosophile ne peut ni voler ni sauter…

Résultats scientifiques Développement, évolution

Au cours du développement, comment les cellules musculaires savent-elles quand stimuler la production des structures intracellulaires nécessaires au mouvement ? En utilisant le modèle drosophile, des scientifiques décrivent, dans un article publié dans Current Biology, le mécanisme qui permet aux cellules musculaires d’induire les changements nécessaires au mouvement sous l’effet de la pression mécanique. 

Le tissu musculaire génère des forces importantes pour permettre les mouvements des animaux. Ces forces sont produites par les cellules musculaires grâce à des filaments contractiles, appelés myofibrilles. L’énergie nécessaire à leur fonctionnement est fournie par des centrales énergétiques cellulaires, appelées mitochondries. Les muscles ont besoin d'une quantité particulièrement importante de ces deux éléments pour produire efficacement des forces élevées et durables. Comment les cellules musculaires savent-elles quand stimuler la production de mitochondries et de myofibrilles au cours du développement ? 

Tono, une protéine qui favorise la maturation des mitochondries et des myofibrilles musculaires.

Dans un article publié dans la revue Current Biology, les scientifiques ont utilisé le modèle drosophile pour répondre à cette question fondamentale. En étudiant toutes les possibilités de manipulation génétique que permet cette espèce, couplée à des analyses en imagerie et des manipulations mécaniques, ils ont découvert qu’une protéine, appelé Tono est nécessaire pour le développement des mitochondries et des myofibrilles musculaires. Tono est de la famille des protéines à doigts de Zinc, c’est-à-dire un facteur de transcription capable de se fixer sur l’ADN pour réguler le fonctionnement des gènes. La protéine Tono est située dans les noyaux musculaires et répond à la pression mécanique exercée par les myofibrilles en croissance. Tono induit alors une modification de l’activité transcriptionnelle qui permet la maturation des mitochondries et des myofibrilles après leur assemblage. 

Sans Tono, la drosophile ne peut ni sauter ni voler.

En absence de Tono, les myofibrilles et les mitochondries restent immatures, les muscles ne fonctionnent pas et les mouches ne peuvent ni voler ni sauter. De façon frappante, les scientifiques ont constaté que l'augmentation artificielle de la pression dans le tissu musculaire entraîne la formation de grosses gouttelettes rondes de Tono dans les noyaux musculaires. Ils proposent donc que Tono pourrait mesurer l'état de la pression dans les muscles en développement et contribuer ainsi à stimuler l'expression des gènes codant pour les mitochondries et les myofibrilles au bon moment. Des protéines BTB-Zn finger mécanosensibles similaires pourraient être importantes pour le développement musculaire chez l'homme. 

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Légende : Régulation mécano-sensible de la myogenèse par le régulateur transcriptionnel à détection de force Tono. Illustration de l'organisation des myofibrilles (en rose), des mitochondries (en orange) et des noyaux (en vert) dans le muscle du vol de la drosophile. On note la forte densité intracellulaire et la tension qui deforme les noyaux et les mitochondries. La protéine nucléaire BTB zinc-finger Tono (en bleu) forme des gouttelettes mécano-sensibles en réponse à la tension exercée par les myofibrilles en maturation sur les noyaux, induisant une transition transcriptionnelle qui déclenche la maturation des sarcomères et des mitochondries. L’augmentation de la tension mécanique sur le tissu forme de larges gouttelettes de Tono.

Référence : Mechanoresponsive regulation of myogenesis by the force-sensing transcriptional regulator Tono. Zhang, X., Avellaneda, J., Spletter, M. L., Lemke, S. B., Mangeol, P., Habermann, B. H., & Schnorrer, F. (2024). 
23 septembre 2024, Current Biology, DOI : 10.1016/j.cub.2024.07.079

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Franck Schnorrer
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