Quelle est la prochaine image ? les neurones surfent sur les ondes thêta pour y répondre
Apprendre une suite de stimuli (un numéro de téléphone par exemple) et le codage précis d'une séquence peut s’avérer crucial dans de nombreuses occasions . A l’aide d’électrodes implantées dans le cerveau de patients, les scientifiques montrent que l'ordre dans une séquence est codé par l’apparition de réponses de neurones spécifiques à des moments bien précis des ondes thêta sous-jacentes.Ces travaux sont publiés dans la revue Nature Communications
Nous sommes capables d’apprendre des séquences de numéros, d’images… mais la manière dont cette fonction cognitive est sous-tendue dans notre cerveau était jusqu’à maintenant incomprise. En étudiant des cellules temporelles d’hippocampe et de cortex temporal enregistrées chez l’Homme, les auteurs expliquent comment ces neurones codent la position temporelle d’une image dans une séquence.
Les neurones vont, par leur activité, collectivement créer des oscillations dont les fréquences sous-tendent des fonctions particulières. L’onde thêta est, entre autres, liée à l’apprentissage et à la mémorisation. S’inspirant de travaux anciens sur la mémorisation spatiale chez le rat, les auteurs montrent que la relation temporelle entre l’activité collective d’oscillation thêta et la réponse d’un neurone isolé à la présentation d’une image identifie la position de cette image dans la séquence.
Neuf patients épileptiques chez qui des microélectrodes intracérébrales ont été implantées - à des fins médicales - dans l’hippocampe et dans le cortex medio-temporal ont participé à cette étude. Ces électrodes permettent d’enregistrer en même temps l’activité résultante d’une petite population de neurones et des neurones isolés la composant. Des images entrainant une réponse neuronale ont d’abord été déterminées, puis les patients ont appris des séquences de 5 à 7 de ces images apparaissant sur un carrousel. Les séquences sont répétées 60 fois et dans 20% des essais, deux images sont proposées et le sujet doit indiquer à l’aide d’une touche de clavier quelle image correspond à la séquence.
En considérant pour chaque image, l’image précédente dans la séquence, l’image elle-même et l’image suivante, les auteurs montrent que le début de réponses de neurones codant spécifiquement une de ces 3 images est fixe par rapport à un cycle d’onde thêta. Pour chaque trio d’images se succédant dans la séquence, les neurones répondent avec une distance au pic d’onde suivant de plus en plus courte : l’identité de l’image est portée par la position temporelle de sa réponse par rapport à ce pic et l’ordre de la séquence par la progression de ces positions, ces changements de position par rapport au pic d’un cycle d’onde étant appelés précession de phase.
En conclusion, ces résultats mettent en évidence l’existence de précession de phase dans le cerveau humain dans une tâche ne faisant pas appel à de la mémorisation spatiale mais à la mémorisation de séquences temporelles. Ce mécanisme pourrait faciliter un apprentissage rapide de ces séquences. De plus, cette étude pourrait permettre d'aborder la compréhension d’autres tâches cognitives chez l’homme.
Pour en savoir plus :
Theta-phase dependent neuronal coding during sequence learning in human single neurons.
Leila Reddy, Matthew W. Self, Benedikt Zoefel, Marlène Poncet, Jessy K. Possel, Judith C. Peters, Johannes C. Baayen, Sander Idema, Rufin VanRullen, Pieter R. Roelfsema.
Nature Communications 10 aout 2021 . . https://doi.org/10.1038/s41467-021-25150-0
Contact
laboratoire
Centre de recherche cerveau et cognition (CerCo) (CNRS/Université Toulouse Paul Sabatier)
Pavillon Baudot – CHU Purpan
BP 25202
31052 Toulouse Cedex