Symbioses végétales intracellulaires : une origine commune repose sur trois gènes
Depuis 450 millions d’années que les plantes vivent sur les terres émergées, elles ont développé une multitude d’associations bénéfiques, symbiotiques, avec leur microbiote. Les plus intimes de ces symbioses voient certains microbes bénéfiques être accommodés à l’intérieur même des cellules de la plante hôte. Dans le cadre d'une étude internationale portant sur l’analyse de plus de 400 espèces végétales publiée dans la revue Nature Plants, les chercheurs ont découvert une base génétique commune à toutes ces symbioses, renforçant l’idée que ces symbioses ont une origine commune.
Les symbioses plantes – microbes, une longue co-evolution. Pendant des milliards d’années, la vie est restée confinée aux étendues aquatiques, océans, mers et lacs. Il y a 450 millions d’années, les plantes ont colonisé les terres émergées, entrainant une métamorphose profonde de notre planète et l’évolution d’écosystèmes contenant une biodiversité animale, microbienne et végétale unique. Il est admis que cet évènement de colonisation a été possible entre autre grâce à l’interaction mutuellement bénéfique de ces premières plantes avec certains champignons qui augmentent les capacités de collecte de nutriments et d’eau dans les sols. Aujourd’hui, si cette symbiose persiste chez 80% des plantes qui nous entourent, elle n’est plus la seule ! En effet, de nombreuses associations symbiotiques ont évolué chez des plantes aussi variées que le soja et la vanille.
Des chercheurs du monde entier s’attèlent à comprendre comment ces symbioses fonctionnent et comment elles ont pu évoluer. Ces questions sont fascinantes à deux égards. Tout d’abord, ces symbioses partagent un phénomène d’interaction entre organismes vivants d’une intimité rare : le symbionte microbien est hébergé à l’intérieur même des cellules végétales. D’autre part, ces symbioses présentent des fonctions écologiques indispensables et sont présentes dans la quasi-totalité des écosystèmes existants. Comprendre ces symbioses et les mécanismes sous-jacents offrent la possibilité de mieux les exploiter en agronomie, ce qui faciliterait la transition vers une agriculture moins dépendante en intrants.
Depuis plusieurs décennies, l’étude de deux symbioses végétales a permis l’identification de plusieurs gènes de plantes impliqués dans la reconnaissance des symbiontes et leur « hébergement » à l’intérieur de la cellule végétales. Les autres symbioses « intracellulaires » avaient été jusqu’à aujourd’hui très peu étudiées.
Une poignée de gènes communs à toutes les symbioses végétales. Pour aller plus loin dans la compréhension des symbioses végétales en général, les chercheurs ont comparé les génomes de plus de 400 espèces de plantes capable de former une ou plusieurs de ces symbioses « intracellulaires ». Dans cette diversité de plantes étaient également présentes des espèces qui aujourd'hui n'ont pas la capacité à s’associer avec ces symbiontes. De manière remarquable, peu importe la nature de leur symbiose, toutes les espèces symbiotiques possèdent trois gènes clés qui ont été systématiquement perdus chez les espèces « non-symbiotiques ». Cela démontre que la grande diversité de symbioses observée chez les plantes est bâtie sur un socle moléculaire commun.
Vers de nouvelles symbioses pour l’agriculture . Le projet ENSA (Engineering Nitrogen Symbioses for Africa, https://www.ensa.ac.uk/), vise à introduire de nouvelles symbioses chez des plantes de grand intérêt agronomique telles le maïs, le blé ou le manioc. De telles symbioses permettraient une forte diminution de l’ajout d’intrants chimiques tout en permettant l’amélioration très significative de la production agronomique dans des régions du monde où la fertilisation, couteuse, n’est pas une option. En démontrant que les symbioses reposent sur une même base génétique, les travaux présentés dans cet article crédibilisent un peu plus cet objectif ambitieux.
Pour en savoir plus :
An ancestral signalling pathway is conserved in intracellular symbioses-forming plant lineages.
Radhakrishnan GV, Keller J, Rich MK, Vernié T, Mbadinga Mbadinga DL, Vigneron N, Cottret L, Clemente HS, Libourel C, Cheema J, Linde AM, Eklund DM, Cheng S, Wong GKS, Lagercrantz U, Li FW, Oldroyd GED, Delaux PM.
Nat Plants. 2020 Mar 2. doi: 10.1038/s41477-020-0613-7. [Epub ahead of print]
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