Rôle de la proximité physique dans la prise impulsive d'aliments

Résultats scientifiques Neuroscience, cognition

Réduire la distance entre soi et des aliments à forte valeur calorique augmente la prise de nourriture. Cet effet est-il dû à l’effort moindre pour accéder à la nourriture proche ou bien à la distance elle-même à l’aliment? En utilisant la réalité virtuelle, les scientifiques ont mis en évidence que la distance physique elle-même influence nos actions face à des aliments. Ces résultats, publiés dans la revue iScience, permettent de mieux comprendre comment la proximité physique joue un rôle clef dans la conduite d'actions impulsives pour la prise alimentaire.

Dans des environnements où nous sommes proches d’aliments à forte densité énergétique, comme aux caisses des supermarchés, nous avons tendance à consommer davantage. Cette observation confirme l'idée que le placement des aliments dans notre environnement peut avoir des effets délétères. La prévalence croissante de l’obésité pourrait être réduite par le changement du comportement grâce à des interventions simples, comme le placement plus éloigné de tels aliments à forte valeur énergétique.

Une question fondamentale est de savoir si cet effet de consommation impulsive d’aliments à proximité est dû à l’effort à fournir qui est moindre pour un aliment proche ou bien à la distance elle-même. On sait que lorsqu’on a à choisir entre deux récompenses (une faible et une élevée), la valeur de l’option "élevée" diminue avec le coût de l’effort à fournir.

Mais, comment distinguer le coût de l’effort de la distance à l’objet ?

En utilisant la technologie de réalité virtuelle (VR), les chercheurs ont réussi à isoler la propriété de proximité afin de mesurer son effet spécifique sur le comportement impulsif. L’hypothèse générale était que la proximité spatiale aurait pour effet de nuire à la maîtrise de soi et donc d'augmenter le comportement impulsif.

Les participants devaient répondre à des images tridimensionnelles représentant des récompenses alimentaires situées à proximité ou plus loin. Les analyses ont révélé que les participants étaient nettement moins capables d'arrêter les actions motrices lorsque les signaux gratifiants étaient proches. Des facteurs normalement associés à la proximité étaient contrôlés, comme l’effort – qui ne variait pas- ou la taille rétinienne des symboles présentés – qui ne différaient pas pour les conditions proches ou lointaines. Ces résultats montrent que la proximité joue un rôle distinctif dans la conduite d'actions impulsives pour des récompenses.

Ces résultats complètent des résultats récents ayant montré l’existence de différents systèmes cérébraux soutenant le processus de régulation de la prise alimentaire. Ils revêtent une importance cruciale dans la compréhension des mécanismes de la prise alimentaire et pourraient s’avérer utile pour mieux aider à développer des méthodes d’intervention pour aider à réduire les troubles alimentaires dans des conditions de prise alimentaire réelles.

 

Figure
© JC Dreher
Figure. Lorsqu’on présente des stimuli de nourriture en réalité virtuelle 3D, les participants ont plus de difficulté à inhiber leurs réponses quand des symboles (ici carré rose sur le pot de M&Ms) appétitifs de ne pas répondre (No-go) semblent proches comparé à lorsqu’ils sont éloignés.
 

 

Pour en savoir plus :


Rewards that are near increase impulsive action
David A. O'Connor, Remi Janet, Valentin Guigon, Anael Belle, Benjamin T. Vincent, Uli Bromberg, Jan Peters, Brice Corgnet and Jean-Claude Dreher
iScience 8 mars 2021;
https://doi.org/10.1016/j.isci.2021.102292

Contact

Jean-Claude Dreher
Chercheur CNRS à l'Institut des sciences cognitives Marc Jeannerod - ISC (CNRS/Université de Lyon)

Laboratoire

Institut des Sciences Cognitives Marc Jeannerod (CNRS/Université de Lyon)
67 Bd Pinel, 69675 Bron, France