Neurones et souvenirs olfactifs

Résultats scientifiques Neuroscience, cognition

L’environnement olfactif change constamment ce qui nécessite des ajustements de la mémoire. Chez un certain nombre de mammifères, de nouveaux neurones naissent et s’intègrent dans le système olfactif adulte, c’est la neurogenèse. Des chercheurs ont montré que ces nouveaux neurones pouvaient assurer la stabilité de la mémoire olfactive déjà acquise mais aussi préserver une flexibilité pour la formation de nouvelles mémoires. Ces résultats sont publiés dans la revue Nature Communications.

Le phénomène de neurogenèse adulte présent chez un certain nombre de mammifères fournit un apport permanent de nouveaux neurones à certaines régions du cerveau et plus particulièrement au système olfactif. On savait que ces nouveaux neurones étaient impliqués dans la formation et le maintien de la mémoire olfactive. Il restait cependant à déterminer comment ce renouvellement continu de nouveaux neurones pouvait d’une part assurer la stabilité de la mémoire déjà acquise et d’autre part préserver une flexibilité pour la formation de nouvelles mémoires.

Dans cette étude sur un modèle murin, les chercheurs révèlent que, lorsque le délai entre deux apprentissages olfactifs est court, les nouveaux neurones qui permettent le premier apprentissage sont très sensibles aux interférences et, de ce fait, sont appelés à mourir lors du deuxième apprentissage, ce qui conduit à l’oubli de cette première mémoire. Dans ce contexte, les chercheurs ont utilisé la technique d’optogénétique qui permet, grâce à la lumière, de moduler sélectivement l’activité des neurones ciblés. Ils montrent que si l’activité de ces nouveaux neurones est bloquée, la mémoire du premier apprentissage est affectée sans avoir de conséquence sur celle formée lors du deuxième. Ce résultat suggère que ces nouveaux neurones ne pourraient servir de support qu’à un seul souvenir olfactif. Par contre, lorsque l’information mémorisée reste utile à l’animal, au-delà de la phase d’apprentissage, les nouveaux neurones survivent et la mémoire est conservée. Enfin, lorsqu’un délai plus long est permis entre les deux apprentissages, une résilience accrue des nouveaux neurones aux interférences est observée et les mémoires acquises successivement sont conservées.

En conclusion, les nouveaux neurones réguleraient le caractère transitoire ou persistant d’une mémoire en fonction du délai entre deux apprentissages et de la pertinence des informations apprises.

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© Jérémy Forest & Nathalie Mandairon

Figure : Si le délai entre deux apprentissages olfactifs est suffisamment long, les informations acquises successivement sont mémorisées et les nouveaux neurones permettant chacun des apprentissages sont sauvés. Lorsque le délai est plus court, le deuxième apprentissage induit la mort des neurones qui sous-tendent la mémoire du premier apprentissage, ce qui conduit à l’oubli. Par contre, lorsque l’information mémorisée reste présente dans l’environnement, au-delà de la phase d’apprentissage, tous les nouveaux neurones survivent et la mémoire des deux odeurs est conservée.

Pour en savoir plus :

Short-term availability of adult-born neurons for memory encoding.

Forest J, Moreno M, Cavelius M, Chalençon L, Ziessel A, Sacquet J, Richard M, Didier A, b N.
Nat Commun. 2019 Dec 6;10(1):5609. doi: 10.1038/s41467-019-13521-7.

Contact

Nathalie Mandairon
Directrice de recherche CNRS au Centre de recherche en neuroscience de Lyon - (CNRS / Inserm / Université Lyon 1)