En Asie, le CNRS au cœur des enjeux mondiaux de la biologie et de l'écologie

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En janvier 2025, André Le Bivic, directeur de CNRS Biologie, a conduit une mission scientifique en Asie, accompagné de plusieurs membres de la direction scientifique de l’institut. Ce déplacement a inclus des visites stratégiques à Singapour et au Japon, deux étapes marquantes pour renforcer les collaborations internationales du CNRS et mettre en lumière les avancées scientifiques réalisées dans des laboratoires de premier plan : l'IRL BMC² à Singapour et l'IRL EARLY au Japon.

BMC² : un laboratoire au carrefour de la biologie et de la physique

C’est au cœur de l’Université nationale de Singapour que se trouve l’IRL BMC² (Bioengineering, Mechanobiology and Cell Biology), laboratoire international qui interroge les lois physiques régissant la cellule. Dirigé par Alphée Michelot, le laboratoire est devenu un centre névralgique pour la recherche en biologie cellulaire et mécanobiologie. L’idée novatrice qui sous-tend les travaux de BMC² repose sur un principe fondamental : et si les forces mécaniques de l’environnement étaient aussi déterminantes que les signaux biochimiques pour comprendre la biologie cellulaire ?

Ce laboratoire interdisciplinaire a fait un bond en avant dans la compréhension des comportements des cellules sous l’effet de diverses contraintes mécaniques. En combinant ingénierie et biologie cellulaire, les chercheurs de BMC² ont développé des modèles permettant d’étudier la migration des cellules tumorales, un sujet crucial pour les traitements du cancer. Ces avancées sont essentielles pour mieux comprendre comment les cellules interagissent avec leur environnement et comment ces interactions peuvent influencer leur capacité à se diviser, à se déplacer ou même à envahir d’autres tissus.

Lors de cette visite, le comité scientifique de l’IRL BMC² a mis en lumière des résultats remarquables, notamment sur la manière dont les cellules se réorganisent sous la pression de leur milieu, qu’il soit naturel ou pathologique. L’objectif est aussi de développer des solutions biomédicales de pointe, notamment dans la régénération tissulaire et la compréhension des mécanismes de résistance aux traitements oncologiques.

EARLY : un modèle pour la recherche sur les récifs coralliens

La deuxième étape de la visite a conduit la délégation du CNRS au Japon, plus précisément à l’Okinawa Institute of Science and Technology (OIST), où l’IRL EARLY (An Eco-Evo-Devo Perspective on Coral Reef Fishes Life Cycle) a été inauguré en octobre 2024. Ce laboratoire, dirigé par Vincent Laudet, s’intéresse à l’étude des poissons coralliens et cherche à déchiffrer les mécanismes biologiques, écologiques et évolutifs qui gouvernent leur cycle de vie. L’enjeu est de taille : comprendre ces mécanismes afin de mieux protéger les récifs coralliens, des écosystèmes marins parmi les plus menacés par les changements environnementaux.

Le choix du poisson-clown comme modèle de recherche permet une exploration inédite des interactions entre biologie du développement, évolution et écologie. Les travaux menés par Vincent Laudet et son équipe démontrent, entre autres, que ces poissons sont capables de « compter » les bandes présentes sur leurs congénères pour moduler leur agressivité et s’intégrer dans la hiérarchie sociale de leurs colonies. Ce genre de découverte, qui semble anecdotique, revêt une importance capitale pour la compréhension des comportements animaux et pour la préservation des espèces marines dans un monde où les récifs coralliens sont soumis à une pression grandissante.

En outre, le laboratoire EARLY a mis en évidence l'impact crucial de l'environnement sur la pigmentation des poissons-clowns. La couleur de ces poissons, loin d’être une simple caractéristique génétique, varie en fonction du type d’anémone avec laquelle ils cohabitent. Ce phénomène, connu sous le nom de plasticité phénotypique, offre un éclairage nouveau sur l’adaptabilité des espèces aux changements environnementaux, un sujet central face au réchauffement climatique et à l’acidification des océans.

© CNRS

De gauche à droite : Jacques Maleval, Directeur du bureau de Tokyo, Keiichi Sato, Directeur général adjoint de l'aquarium Okinawa Churaumi et Chercheur principal au centre de recherche Okinawa Churashima, André Le Bivic, Directeur de CNRS Biologie, Patrick Blader, Directeur adjoint scientifique de CNRS Biologie, Vincent Laudet, Directeur de l'IRL EARLY.

Un partenariat renforcé pour des enjeux globaux

Ces deux laboratoires, l’un en plein cœur de Singapour, l’autre à Okinawa, incarnent un modèle de coopération scientifique internationale du CNRS. Au-delà des avancées académiques, ces initiatives sont également porteuses de solutions face à des défis mondiaux : la préservation des récifs coralliens, essentiels pour la biodiversité marine, et la compréhension des cellules et de leur environnement pour améliorer les traitements médicaux.

Les discussions menées lors de cette mission ont été l’occasion de consolider les collaborations entre la France et ses partenaires asiatiques, en particulier avec des institutions comme l’Academia Sinica de Taïwan Université de technologie de Nanyang ou l’Université nationale de Singapour. La coopération entre les scientifiques français et asiatiques s’est intensifiée, avec des projets de mobilité pour chercheurs et étudiants, ainsi que des échanges sur des techniques de pointe.

À Singapour comme au Japon, l’empreinte du CNRS dans le paysage scientifique international est désormais indélébile, et les fruits de cette collaboration franco-asiatique devraient avoir des répercussions durables dans la recherche de demain.