Des pompiers moléculaires pour éteindre le choc septique bactérien

Résultats scientifiques Immunologie, infectiologie

Les sepsis infectieux sont caractérisés par un emballement du système immunitaire suite à une infection. Ils sont responsables de plus de 6 millions de décès chaque année dans le monde. Alors qu’il existe plusieurs types d’agents infectieux (bactéries, virus, parasites ou champignons) capables d’induire le sepsis, il n’existe pas de traitement généralisable encore efficace contre cette pathologie. En étudiant les causes de sepsis bactériens, les scientifiques proposent un concept nouveau selon lequel la mortalité dans le sepsis infectieux serait due à l’explosion d’une mort cellulaire essentielle à notre organisme en temps normal. Ces résultats sont publiés dans la revue EMBO Reports.

Les chercheurs ont découvert que nos cellules possèdent des protéines, appelées Gate-16 et Irgm2, capables d’empêcher nos cellules de mourir de manière anarchique au cours d’une infection bactérienne ; ces protéines permettent ainsi à la fois de protéger l’intégrité de nos tissus et organes, comme le foie ou le poumon, et d’empêcher la dérégulation du système immunitaire qui se caractérise par ce que l’on appelle « l’orage cytokinique ». Ainsi, des souris déficientes pour la protéine Irgm2 sont extrêmement susceptibles au choc septique bactérien du fait de la mise en place incontrôlée d’une mort cellulaire particulière appelée « pyroptose », responsable de l’initiation du choc septique létal. Enfin, l’inactivation de la protéine responsable de cette mort, nommée caspase-11, protège les souris déficientes en Irgm2 contre un choc septique bactérien. De façon remarquable, cette même découverte a été faite de façon concomitante par l’équipe de Jorn Coers aux États-Unis, les deux études étant publiées dans le même numéro de EMBO Reports.

La mise en évidence du rôle central de la mort cellulaire dérégulée comme étant la cause du sepsis bactérien constitue à la fois un changement majeur dans la compréhension même du sepsis, mais aussi une source d’espoir pour le traitement de nouveaux sepsis infectieux, tel que celui induit par le nouveau coronavirus SARS-CoV-2, ou de nombreux autres agents infectieux. Ces travaux sur les bactéries sont à mettre en parallèle avec une nouvelle étude qui suggère un effet protecteur de certaines molécules inhibant les voies de mort cellulaire contre le sepsis induit par certaines souches de coronavirus.

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© Rémi Planès/Etienne Meunier

Figure : Irgm2 et Gate16 coopèrent pour calmer le sepsis. En l'absence d'Irgm2 et de Gate16, la Caspase-11 est fortement recrutée sur le lipopolysaccharide (LPS) bactérien, ce qui favorise la pyroptose non contrôlée et la maturation et la libération de cytokines IL-1, contribuant ainsi au sepsis. Au contraire, l'Irgm2 inductible par l'interféron et la protéine d'autophagie non canonique Gate-16 coopèrent pour limiter le ciblage de la Caspase-11 sur les bactéries Gram-négatives.

 

Pour en savoir plus :

Irgm2 and Gate-16 cooperatively dampen Gram-negative bacteria-induced caspase-11 response.
Eren E, Planès R, Bagayoko S, Bordignon PJ, Chaoui K, Hessel A, Santoni K, Pinilla M, Lagrange B, Burlet-Schiltz O, Howard JC, Henry T, Yamamoto M, Meunier E.

EMBO Rep. 2020 Nov 5. doi: 10.15252/embr.202050829.

Contact

Etienne Meunier
Chercheur CNRS à l'Institut de pharmacologie et de biologie structurale

Laboratoire

Institut de pharmacologie et de biologie structurale (IPBS) - (CNRS/Université Paul Sabatier)
205 route de Narbonne, 31077 Toulouse Toulouse Cedex4