Comment le système de récompense module-t-il les réactions de peur ?
Lorsqu'un stimulus ou une situation est perçu comme menaçant, le cerveau active de nombreux circuits neuronaux pour élaborer une réponse comportementale adaptée. Ainsi, un état d’immobilité, également appelé « freezing », peut se manifester et constitue une étape clef de la gestion du stress chez l'homme. Les scientifiques démontrent un rôle inattendu du système de récompense dans la modulation du freezing. Ces résultats sont publiés dans la revue Molecular Psychiatry.
Le stress est un moteur essentiel de l'adaptation et la réponse au stress d’un organisme est généralement bénéfique car elle favorise la survie. En cas de danger, le cerveau orchestre la détection et la réponse aux stimuli aversifs environnementaux et guide ainsi la sélection de la stratégie d'adaptation la plus appropriée parmi un répertoire diversifié de comportements défensifs. Ces comportements innés et acquis ont été façonnés par la sélection naturelle et conservés à la fois chez les invertébrés et les vertébrés. Ils comprennent des stratégies passives telles que le « freezing » (ou immobilité) et des réponses actives « fight or flight » (combat ou fuite), et le passage entre ces modes passifs/actifs est essentiel pour la flexibilité comportementale. Le freezing est une réponse universelle à la peur caractérisée par une absence totale de mouvement, à part la respiration, due à une posture corporelle tendue lorsqu'une menace est rencontrée. Le freezing est essentiel dans les processus de gestion du stress, car il correspond à un état d'hypervigilance qui permet de prendre des décisions et, par conséquent, d'élaborer la stratégie comportementale la plus pertinente. Bien que le freezing soit pertinent pour l'étiologie des troubles liés à la peur tels que les troubles de stress post-traumatique, les attaques de panique et les phobies sociales, les circuits neuronaux et les substrats cellulaires sous-jacents sont loin d'être bien compris.
Pour aborder cette question, les scientifiques ont combiné des approches par électrophysiologie ex vivo et in vivo couplées à des outils de pharmaco- et optogénétiques complétées par des analyses par microscopie. Ils ont utilisé un modèle préclinique d’exposition à un stimulus aversif et mesuré les réponses immédiates de freezing. Ils ont ainsi mis en évidence de nouvelles structures clefs modulant ce comportement de défense. Ces structures cérébrales relient les neurones GABAergiques du tegmentum latéro-dorsal (LDTg) qui projettent vers l’aire tegmentale ventrale (ATV), une structure bien connue pour son rôle dans les réponses liées à la récompense. Au sein de l’ATV, ce sont également les neurones GABAergiques de projection qui transmettent ensuite cette information à l'amygdale cérébrale.
L'activation, par des événements aversifs, du triumvirat LDTg-ATV-Amygdale permet de mieux comprendre les processus cérébraux d'adaptation au stress. Ces résultats remettent notamment en question la vision jusqu’alors acceptée de l'axe LDTg-ATV qui a été historiquement lié à la récompense et aux processus de renforcement.
Pour en savoir plus :
A non-canonical GABAergic pathway to the VTA promotes unconditioned freezing
Loïc Broussot, Thomas Contesse, Renan Costa-Campos, Christelle Glangetas, Léa Royon, Hugo Fofo, Thomas Lorivel, François Georges, Sebastian P. Fernandez and Jacques Barik
Molecular Psychiatry 20 septembre 2022. https://doi-org.insb.bib.cnrs.fr/10.1038/s41380-022-01765-7
Contact
Laboratoire
Institut de pharmacologie moléculaire et cellulaire (CNRS/Université Côte d’Azur).
660 route des Lucioles
06560 Sophia Antipolis
Valbonne