Comment l’ADN s’ouvre au moment de se répliquer
Une étude publiée dans Cell éclaire les toutes premières étapes d’initiation de la réplication de l’ADN eucaryote dévoilant un processus proche de celui « d’une fermeture éclair ». Cette découverte permettrait de cibler plus spécifiquement les complexes de réplication aberrants des cellules tumorales en préservant ceux des cellules saines.
Depuis que James Watson, Francis Crick et Rosalind Franklin ont dévoilé la structure de la double hélice d'ADN en 1953, la façon dont les doubles brins d'ADN se déroulent et se déploient lors des phases précoces de l’initiation de la réplication est toujours non résolu.
Chacune de nos cellules porte en elle deux mètres d’ADN, qu’elle doit répliquer à chaque division cellulaire. Pour cela, il faut que les paires de chromosomes s’ouvrent et se séparent en deux brins qui serviront de modèle à l’ADN polymérase pour synthétiser les brins complémentaires. Les erreurs dans ce processus sont notamment à l’origine des tumeurs. On savait que chez les eucaryotes (organismes dont les cellules possèdent un noyau, comme les humains, les animaux, les champignons et les plantes), le mécanisme pour initier la réplication de l’ADN repose sur les produits des gènes MCM2-7 (MiniChromosome Maintenance) qui sont recrutés sur l'ADN double-brin aux origines de réplication de manière ATP-dépendante. Les MCM2-7 s’assemblent alors pour former un complexe en double hexamère (DH) en configuration tête-à-tête, encerclant l’ADN le long des chromosomes. En revanche, la façon dont laquelle les brins sont séparés afin d’aboutir à une structure ouverte et accessible était encore mal comprise.
Grâce à des approches multidisciplinaires dont la cryomicroscopie électronique, les scientifiques ont pu observer de façon claire comment le complexe MCM2-7 déstabilise l’ADN, permettant sa première ouverture, précisément à la jonction des deux hexamères, pour former une structure ouverte initiale (IOS), un peu comme une fermeture éclair séparant deux bords crantés. L'équipe a également découvert que les DH MCM2-7 sont positionnés sur l'ADN sur des dizaines de milliers de sites à travers le génome humain, qui s'excluent mutuellement avec les loci de transcription active. Enfin, lorsque cette structure initiale est perturbée, les DH MCM2-7 ne peuvent plus s'assembler sur l'ADN. Impossible alors pour l’ADN de se répliquer.
Cette découverte inédite laisse espérer une nouvelle ère dans les traitements contre le cancer. Pour le moment, les thérapies disponibles, notamment les chimiothérapies, tuent les cellules qui se répliquent sans distinction, qu’elles soient normales ou cancéreuses. Développer de nouveaux traitements ciblés vers ces étapes précoces de la réplication impliquant les MCM2-7 permettrait de mettre en pause la réplication des cellules normales et d‘atteindre spécifiquement les cellules cancéreuses en cours de division qui seraient alors détruites.
Pour en savoir plus :
The Human Pre-replication Complex is an Open Complex.
Li J., Dong J., Wang W., Yu D., Lee C.S.K., Lam W.H., Alary N., Fan X., Yang Y., Hui Y.C., Zhang Y., Zhao Q., Chen C.L., Bik-Kwoon Tye B.K., Dang S., Zhai Y.
Cell. Janvier 2023. DOI:https://doi.org/10.1016/j.cell.2022.12.008.
Actualité de l'Institut Curie :
Une équipe de l’Institut Curie découvre comment l’ADN se dézippe au moment de se répliquer | Institut Curie
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Dynamique de l'information génétique : bases fondamentales et cancer (CNRS/Institut Curie)
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