Cibler l’addiction aux acides gras des tumeurs du foie β-caténine : une promesse thérapeutique
Figure : Absence d’accumulation des lipides dans les carcinomes hépatocellulaires β-caténine. Les lipides (en rouge) sont physiologiquement présents dans le foie normal. Dans les cellules tumorales, l’activation de l’oxydation des acides gras conduit à l’

Cibler l’addiction aux acides gras des tumeurs du foie β-caténine : une promesse thérapeutique

Résultats scientifiques

Les carcinomes hépatocellulaires (CHC) constituent à ce jour la deuxième cause de mort par cancer dans le monde. Les chercheurs de l’Institut Cochin, ont montré dans un article publié le 12 avril 2018 dans la revue Gut que, contrairement à la majorité des CHC qui utilisent le glucose comme fournisseur principal d’énergie, les CHC activés pour l’oncogène β-caténine utilisent une catégorie spécifique de lipides : les acides gras. Ils démontrent que cette source d’énergie est importante à la fois pour l’initiation du processus tumoral et pour la progression tumorale.

Le carcinome hépatocellulaire (CHC) est actuellement la deuxième cause de mort par cancer dans le monde du fait notamment de l’absence de traitements efficaces. La voie de signalisation β-caténine est très fréquemment dérégulée dans les CHC, ces tumeurs sont nommées CHC β-caténine. 

Les chercheurs s’intéressent aux modifications métaboliques développées par les cellules tumorales pour répondre à leurs besoins énergétiques élevés liés aux divisions cellulaires rapides et incontrôlées. Ainsi, la plupart des tumeurs primitives et métastatiques ont une consommation anormalement élevée en glucose par rapport aux cellules normales, une propriété qui est d’ailleurs largement exploitée pour repérer les cellules malignes par utilisation d’un traceur et de l’imagerie médicale, le PET scan fluorodéoxyglucose. 

A l’aide d’un modèle de souris développant des CHC β-caténine, ils ont découvert que les cellules tumorales de ces CHC utilisent comme principale source d’énergie non pas le catabolisme du glucose, mais la dégradation oxydative des acides gras. Les auteurs démontrent que cette source énergétique est primordiale pour l’initiation du processus tumoral mais aussi pour la progression de ces tumeurs. Pour cela, ils ont croisé des souris développant des CHC β-caténine avec une lignée de souris dépourvues du facteur de transcription PPARα, un acteur majeur du contrôle de l’oxydation des acides gras dans le foie. En absence de PPARα, le nombre de souris développant des tumeurs est fortement diminué et ces tumeurs apparaissent beaucoup plus tardivement. Enfin, le traitement des souris développant des CHC β-caténine avec un inhibiteur pharmacologique de l’oxydation des acides gras ralentit très fortement la croissance tumorale. Chez l’homme, les chercheurs ont confirmé l’activation d'un programme d'oxydation des acides gras spécifiquement dans les CHC β-caténine. 

L’ensemble de ces travaux ouvre de nouvelles perspectives thérapeutiques pour le traitement des CHC β-caténine, à savoir l’utilisation d’inhibiteurs de l’oxydation des acides gras pour bloquer la croissance tumorale. Plusieurs de ces inhibiteurs de l’oxydation des acides gras sont déjà utilisés en essais précliniques ou cliniques chez l’homme pour traiter d’autres pathologies.

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Figure : Absence d’accumulation des lipides dans les carcinomes hépatocellulaires β-caténine. Les lipides (en rouge) sont physiologiquement présents dans le foie normal. Dans les cellules tumorales, l’activation de l’oxydation des acides gras conduit à l’absence d’accumulation.
© Pascale Bossard

 

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Pascale Bossard
Institut Cochin Oncogenèse des épithéliums digestifs CNRS - UMR8104 - Inserm U1016 - Université Paris Descartes