Découverte scientifique sur la réparation de l'ADN de certaines bactéries du sol

 
Publié le 6/03/2024

Des chercheurs du laboratoire lorrain DynAMic (INRAE/Université de Lorraine) ont découvert comment une bactérie du sol répare les erreurs qui surviennent lorsqu'elle copie son ADN. Leurs résultats, publiés dans la prestigieuse revue Nucleic Acids Research, révèlent que la réparation de l’ADN est un puissant moteur de l’évolution du génome bactérien.

Contexte biologique. Dans toutes les cellules vivantes, l'ADN est constamment exposé à des dommages. Parmi les plus graves, les cassures double brin (DSB) nécessitent des mécanismes sophistiqués pour être réparées et peuvent entraîner des modifications génétiques importantes. Un autre type de dommage survient lorsque deux bases de l'ADN ne sont pas appariées correctement, une anomalie appelée mésappariement. Pour corriger ces erreurs apparues pendant la copie du matériel génétique, les cellules utilisent un système de réparation appelé MMR (Mismatch Repair).

Un système de réparation paradoxal. Récemment, un nouveau système MMR a été identifié chez les archées et certaines bactéries. Chez les Streptomyces, bactéries du sol, modèle étudié par l'équipe StrAda du laboratoire DynAMic, ce mécanisme de réparation implique l’enzyme NucS, qui agit de manière surprenante en cassant les deux brins de l'ADN pour éliminer la région incorrecte. Cette méthode de réparation est paradoxale car elle introduit un dommage encore plus grave que le dommage lui-même pour le corriger. Cependant, les chercheurs ont montré que l’enzyme NucS joue un rôle crucial dans la prévention des mutations liées aux erreurs de réplication. L'enzyme NucS coupe la double hélice de l'ADN au site du mésappariement, réduisant ainsi les risques de mutation. En outre, ce mécanisme semble également contribuer à la création d'un biais évolutif dans le génome de la bactérie au fil du temps.

Les Streptomyces sont d'un intérêt particulier car ce sont d'importants producteurs de composés naturels ayant des applications médicales, notamment des antibiotiques. Ils sont également essentiels pour la santé et la croissance des arbres en tant que composants importants de la flore du sol. De plus, ils présentent des mécanismes évolutifs remarquables qui influencent la plasticité de leur génome.

Cette découverte pose de nouvelles questions scientifiques : comment les cassures double brin causées par l’enzyme NucS sont-elles réparées ? Ces cassures pourraient-elles être responsables de la plasticité du génome de ces bactéries ? Est-ce que les bactéries ont évolué pour sélectionner ce système de correction des mésappariements atypique afin de stimuler leur évolution et leur adaptation ?

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Légende de la photo : Colonies bactériennes (Streptomyces). La déficience en enzyme NucS (à droite) provoque une augmentation des mutations, visibles sous forme de colonies (flèches) sans pigment, à l'aspect lisse ou encore de morphologie anormale. En présence de l’enzyme NucS (à gauche) le phénomène est observable à basse fréquence.