Virus Zika - Lipides - Placenta: Trois acteurs mais un seul vainqueur

Résultats scientifiques Immunologie, infectiologie

Depuis sa réémergence et son infection massive des Amériques en 2015, le virus Zika est responsable de nombreuses pathologies placentaires pouvant avoir des conséquences graves sur le fœtus. Dans une étude récente, les scientifiques ont démontré que le virus Zika détourne le métabolisme des lipides afin de créer des usines de réplication virale et de perturber l’équilibre inflammatoire du placenta. Ce travail est publié dans la revue Nature Communications.

Longtemps considéré comme un virus anodin ne provoquant que des symptômes mineurs, le virus Zika est désormais tristement connu pour être responsable de pathologies placentaires et développementales graves. L’infection par ce virus pendant le premier ou le second trimestre de grossesse cause des plusieurs pathologies fœtales regroupées sous le terme du syndrome congénital Zika, les plus sévères étant la mortalité in utero et la microcéphalie.

Malgré de nombreux progrès dans le domaine, on ne sait toujours que très peu de choses sur les mécanismes permettant au virus de traverser la barrière du placenta, de s’y multiplier massivement et d’atteindre le fœtus. Ce manque de connaissances représente un véritable frein pour le développement de nouvelles stratégies diagnostiques et thérapeutiques pour prévenir ces effets dévastateurs.

En utilisant des techniques d’analyse du métabolisme cellulaire à grande échelle, les chercheurs ont montré que l'infection virale altère le métabolisme des lipides cellulaires et modifie ainsi la composition des lipides du placenta durant le premier trimestre de grossesse. Ces altérations métaboliques fournissent les éléments de base pour la génération des lipides nécessaires à la réplication virale et à l’assemblage de nouveaux virions. Les modifications du profil lipidique par le virus Zika induisent des dérégulations du fonctionnement cellulaire et touchent les fonctions dites barrières du placenta qui sont essentielles à la défense contre les pathogènes. Ainsi, un déséquilibre dans la balance entre protection du placenta et pathogénicité du virus cause une inflammation massive qui peut contribuer aux lésions du tissu et à la sévérité des symptômes.

En conclusion, dans cette étude, les scientifiques ont mis en lumière les mécanismes utilisés par le virus Zika pour détourner le métabolisme des lipides à son avantage et favoriser sa propre réplication au détriment des fonctions tissulaires classiques. Ces perturbations contribuent au dysfonctionnement placentaire et à la perte de la fonction barrière qui sont responsables de la transmission du virus au fœtus. De plus, ces travaux apportent de nouvelles bases solides pour le développement de stratégies thérapeutiques visant à limiter la propagation du virus Zika et prévenir les effets néfastes d’une infection congénitale.

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© Qian Chen & Nabila Jabrane-Ferrat

Figure : Résumé schématique de la reprogrammation métabolique du placenta humain induite par le virus Zika. Les organites cellulaires impliqués dans le cycle viral sont représentés. En augmentant les lipides du placenta, le virus contribue à une inflammation massive du placenta et prive le fœtus de lipides essentiels à son développement.

 

Pour en savoir plus :

Metabolic Reprogramming by Zika Virus Provokes Inflammation in Human Placenta
Chen Q,  Gouilly J, Ferrat YJ, Espino A, Glaziou Q, Cartron G, El-Costa H, Al-Daccak R, Jabrane-Ferrat N

Nature communications 11 juin 2020  https://doi.org/10.1038/s41467-020-16754-z

 

Contact

Nabila Jabrane-Ferrat
Directrice de Recherche CNRS au Centre de Physiopathologie Toulouse Purpan (CPTP)

Laboratoire

Centre de Physiopathologie Toulouse Purpan (CPTP) - (CNRS/Université Paul Sabatier/Inserm)
Place du Dr Baylac
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