Comment le virus du rhume facilite les surinfections bactériennes

Résultats scientifiques Immunologie, infectiologie

Les rhinovirus humains, responsables du rhume, sont capables de diminuer la capacité des macrophages à capturer des bactéries respiratoires, qui peuvent alors se développer comme bactéries opportunistes, en particulier chez les patients souffrant de bronchopathie chronique obstructive (BPCO). Pour cela, les rhinovirus ciblent la protéine Arpin, dont le rôle majeur dans la phagocytose est donc révélé ici par ces virus ! Ces travaux viennent d’être publiés dans le journal EMBO reports.

Les rhinovirus humains sont des virus de la famille des Picornaviridae qui infectent les voies aériennes supérieures et causent des infections en général bénignes, majoritairement des rhumes. Cependant, pour des personnes atteintes de maladies inflammatoires chroniques comme la Broncho-Pneumopathie Chronique Obstructive (BPCO) ou l’asthme, ces infections virales aggravent les symptômes et conduisent fréquemment à des surinfections bactériennes.

Les macrophages jouent un rôle majeur dans l’immunité innée, la surveillance des voies aériennes et l’élimination locale des débris. Lors de la BPCO, les macrophages alvéolaires sont plus nombreux, mais moins capables d’éliminer les débris et les bactéries, et leur défaut d'élimination des bactéries est aggravé par les infections à rhinovirus. Les mécanismes responsables de ces défauts des macrophages ne sont pas bien connus.

Les chercheurs ont montré que l’infection des macrophages par les rhinovirus humains de type 16 conduit à une diminution forte de leurs capacités d’internaliser diverses bactéries comme les Haemophilus influenzae non typables, Staphylococcus aureus, Pseudomonas aeruginosa, ou encore divers types de particules inertes. La polymérisation du cytosquelette d’actine est la force motrice qui permet de déformer la membrane plasmique et d’initier la phagocytose. Lorsque les macrophages sont infectés par les rhinovirus, le processus est bien initié mais l’internalisation ne s’effectue pas efficacement. Le virus induit la diminution d’expression d’une protéine régulatrice de la polymérisation de l’actine, la protéine Arpin, dont le rôle essentiel dans la phagocytose est révélé par ces travaux. En effet, lorsqu’une diminution d’expression de la protéine Arpin est induite par ARN interférence, l’efficacité de phagocytose est également très réduite.

Des expériences d’infection par les rhinovirus et de complémentation par expression ectopique de la protéine montrent que Arpin est bien le facteur cellulaire cible du virus pour bloquer la phagocytose et la capture bactérienne par les macrophages en conditions d’infections.

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© Florence Niedergang

Figure : La protéine Arpin inhibitrice du complexe Arp2/3 joue un rôle majeur lors de la capture de bactéries et la formation des phagosomes. Son expression est diminuée dans les macrophages traités par le rhinovirus humain 16, ce qui conduit à réduire les capacités phagocytaires des macrophages dans ces conditions et contribue aux exacerbations.

Pour en savoir plus:

Arpin is critical for phagocytosis in macrophages and is targeted by human rhinovirus.

Jubrail J, Africano-Gomez K, Herit F, Mularski A, Bourdoncle P, Oberg L, Israelsson E, Burgel PR, Mayer G, Cunoosamy DM, Kurian N, Niedergang F
EMBO Rep. 2019 Nov 13:e47963. doi: 10.15252/embr.201947963. [Epub ahead of print]
PMID:31721415

vidéo

Recrutement concomitant des protéines arpin (vert) et du marqueur de l’actine polymérisée Lifeact (rouge) dans un phagosome en cours de formation et de fermeture, suivi par microscopie à onde évanescente.

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Florence Niedergang
Directrice de recherche CNRS