Une méthode pour pouvoir travailler sur les combinaisons de variants génétiques propres à un trait de caractère

Résultats scientifiques Génétique, génomique

L’étude des variants génétique permettant d’expliquer des traits de caractères spécifiques se faisait à ce jour variant par variant. Or c’est souvent leurs combinaisons qui a de l’intérêt. Dans un article publié dans la revue Genome Biology, les scientifiques décrivent une méthode mêlant mathématique, génétique et calcul haute performance pour créer des cartes d’interactions exhaustives rassemblant plusieurs dizaines de milliards d’interaction entre variants génétiques et permettant d’étudier ces combinaisons

Tout le monde a entendu parler des test génétiques de prédisposition aux maladies fournies par certaines sociétés sur internet. Mais comment les scientifiques trouvent les marqueurs dans notre ADN qui prédisent ces maladies?

Le Genome-Wide Association Study (GWAS) est une méthode de recherche qui explore les relations entre des variations génétiques, appelées polymorphismes, et des traits spécifiques, tels que des maladies chez les humains ou des caractéristiques agronomiques chez les plantes.
Pour réaliser une étude GWAS, les scientifiques collectent des données génétiques de nombreux individus, qui peuvent être des humains, des plantes ou tout être vivant, et comparent ces données pour repérer des régions spécifiques du génome où les variations génétiques sont associées à des traits particuliers (susceptibilité à des maladies cancer, diabète, calvitie,.., rendements des cultures, …). 
En utilisant des techniques statistiques avancées, ils identifient les polymorphismes ou variants qui se trouvent plus fréquemment chez les individus présentant le trait étudié. Ces associations peuvent fournir des indices précieux sur les gènes qui influencent le trait ou des marqueurs pour le prédire.

Jusqu’à présent, la recherche des variants ayant un lien avec le trait se faisait un par un. Cependant, les scientifiques sont convaincus depuis des années que ce ne sont pas seulement les variants pris un par un qui ont un effet mais plutôt leur combinaison (c’est ce que l’on appelle l’épistasie). Mais l’étude de la combinaison des variants se heurte à un plafond de verre qui est que les variants (plusieurs millions chez les plantes et les humains) sont trop nombreux pour qu’il soit possible d’étudier toutes leurs combinaisons. En effet, avec un grand nombre de variants génétiques dans le génome, il existe un nombre exponentiel de combinaisons possibles d'interactions entre ces variants. Cela rend la recherche exhaustive de toutes les interactions potentielles extrêmement difficile. Il était jusqu'à présent considéré impossible d'étudier l’entièreté de toutes ces combinaisons.
C’est ce plafond de verre qui vient d’exploser et qui est détaillé dans l’article publié dans Genome Biology.

En combinant une astuce mathématique, l’utilisation de calculateurs graphiques (les mêmes que ceux utilisés pour les jeux vidéos ou pour entraîner des modèles d’intelligence artificielle), les scientifiques proposent maintenant une méthode qui consiste à fournir des cartes de plus de 60 milliards d’interactions entre variants pour comprendre un trait donné. Ils appliquent cela sur les plantes pour le moment mais ont déjà des collaborations pour l’étude de traits liés à des maladies humaines. Les applications sont extrêmement nombreuses et ouvrent la voie à des applications en médecine, en agronomie et au-delà.

© Gabriel Krouk et BionomeeX

Figure : Ce triangle présente les 60 milliards d’interactions entre variants génétiques. Pour visualiser ce volume de données un système permettant un « zoom génétique » a été mis en place. Les points les plus jaunes sont les points porteurs potentiellement d’interaction épistatiques.

En savoir plus : Carré, C., Carluer, J.B., Chaux, C. et al. Next-Gen GWAS: full 2D epistatic interaction maps retrieve part of missing heritability and improve phenotypic prediction. Genome Biol 25, 76 (2024). https://doi.org/10.1186/s13059-024-03202-0.

Contact

Gabriel Krouk
Directeur de recherche CNRS

Laboratoire

Institut des sciences des plantes de Montpellier - IPSiM (CNRS/Inrae/Université de Montpellier)
2 place Pierre Viala
34060 Montpellier