Un nouveau mécanisme de la régulation temporelle de la communication entre neurones dévoilé

Résultats scientifiques

En combinant la microscopie à super-résolution STED sur cellules vivantes avec des techniques d’enregistrement de l’activité électrique neuronale et des simulations  mathématiques, Ronan Chéreau et ses collaborateurs à l’Institut interdisciplinaire de neurosciences, révèlent que l’activité électrique des neurones induit un élargissement des axones, ce qui modifie de manière importante la vitesse de transmission des messages électriques nerveux. Cette étude qui remet en question la vision classique des axones, a été publiée le 23 janvier 2017 dans la revue PNAS.

Les axones transmettent des informations aux neurones proches ou très éloignés. Ils ont longtemps été considérés comme des câbles électriques qui transmettent fidèlement des impulsions nerveuses d’une manière binaire, "tout ou rien", sur des distances variables. Le temps de propagation des potentiels d’action générés détermine le temps de transfert de l’information dans les circuits neuronaux. Dans les axones dépourvus de myéline, la vitesse de conduction des potentiels d'action dépend fondamentalement du diamètre des axones, qui est très variable. Or, nous ne savons pas si les diamètres des axones sont dynamiques et régulés par des mécanismes dépendants de l’activité neuronale. En raison de leur petite taille, une centaine de nanomètres, il n'a pas été possible d’étudier la dynamique de leur morphologie dans le tissu cérébral vivant avec la microscopie de fluorescence habituelle.
En utilisant la microscopie de super-résolution par intervalles de temps dans des tranches de cerveau, les chercheurs montrent que les axones deviennent plus larges suite à une décharge de potentiels d’action à haute fréquence: les boutons synaptiques s’élargissent rapidement d’une manière transitoire, tandis que le diamètre de l’arbre axonal augmente tardivement plus progressivement. Des simulations numériques de la propagation des potentiels d'action, incorporant ces dynamiques morphologiques, ont prévu des effets bidirectionnels sur la vitesse de conduction des potentiels d'action. Des expériences d’électrophysiologie confirment ces prédictions. En effet, elles montrent dans un premier temps que la conduction des potentiels d'action ralentit lorsque les boutons synaptiques s’agrandissement de manière transitoire. Puis, qu’une augmentation prolongée de la vitesse de conduction accompagne l’élargissement de l’arbre axonal induit par une décharge de potentiels d’action à haute fréquence. 
Globalement, cette étude décrit un nouveau mécanisme de la plasticité morphologique qui explique la régulation fine de la vitesse de conduction des potentiels d’action. Ces résultats ouvrent des perspectives nouvelles pour comprendre la régulation temporelle de la propagation de l’information neuronale dans le cerveau. 

 

Image retirée.
Figure : Imagerie à super-résolution des axones et de leur plasticité. Cette image, réalisée avec un microscope à super-résolution appelé STED, montre des neurones colorés avec une protéine fluorescente dans un tissu cérébral vivant de souris.

© Ronan Chéreau et Valentin Nägerl
 

 

 

En savoir plus

  • Superresolution imaging reveals activity-dependent plasticity of axon morphology linked to changes in action potential conduction velocity.
    Ronan Chereau, Ezequiel Saraceno, Julie Angibaud, Daniel Cattaert and U. Valentin Nägerl.
    PNAS. 2017 ; published ahead of print January 23, 2017, doi:10.1073/pnas.1607541114

 

 

Les axones transmettent des informations aux neurones proches ou très éloignés. Ils ont longtemps été considérés comme des câbles électriques qui transmettent fidèlement des impulsions nerveuses d’une manière binaire, "tout ou rien", sur des distances variables. Le temps de propagation des potentiels d’action générés détermine le temps de transfert de l’information dans les circuits neuronaux. Dans les axones dépourvus de myéline, la vitesse de conduction des potentiels d'action dépend fondamentalement du diamètre des axones, qui est très variable. Or, nous ne savons pas si les diamètres des axones sont dynamiques et régulés par des mécanismes dépendants de l’activité neuronale. En raison de leur petite taille, une centaine de nanomètres, il n'a pas été possible d’étudier la dynamique de leur morphologie dans le tissu cérébral vivant avec la microscopie de fluorescence habituelle.
En utilisant la microscopie de super-résolution par intervalles de temps dans des tranches de cerveau, les chercheurs montrent que les axones deviennent plus larges suite à une décharge de potentiels d’action à haute fréquence: les boutons synaptiques s’élargissent rapidement d’une manière transitoire, tandis que le diamètre de l’arbre axonal augmente tardivement plus progressivement. Des simulations numériques de la propagation des potentiels d'action, incorporant ces dynamiques morphologiques, ont prévu des effets bidirectionnels sur la vitesse de conduction des potentiels d'action. Des expériences d’électrophysiologie confirment ces prédictions. En effet, elles montrent dans un premier temps que la conduction des potentiels d'action ralentit lorsque les boutons synaptiques s’agrandissement de manière transitoire. Puis, qu’une augmentation prolongée de la vitesse de conduction accompagne l’élargissement de l’arbre axonal induit par une décharge de potentiels d’action à haute fréquence. 
Globalement, cette étude décrit un nouveau mécanisme de la plasticité morphologique qui explique la régulation fine de la vitesse de conduction des potentiels d’action. Ces résultats ouvrent des perspectives nouvelles pour comprendre la régulation temporelle de la propagation de l’information neuronale dans le cerveau. 

 

Image retirée.
Figure : Imagerie à super-résolution des axones et de leur plasticité. Cette image, réalisée avec un microscope à super-résolution appelé STED, montre des neurones colorés avec une protéine fluorescente dans un tissu cérébral vivant de souris.

© Ronan Chéreau et Valentin Nägerl

 

Contact

Valentin Nägerl
Chercheur à l'Institut interdisciplinaire de neurosciences (IINS) - (CNRS / Université de Bordeaux)