Le blob est capable de percevoir le stress de ses congénères

Résultats scientifiques Neuroscience, cognition

Le blob (Physarum Polycephalum), un organisme unicellulaire dépourvu de système nerveux, ne cesse de nous étonner par ses capacités surprenantes. Il est capable de mémoriser, de résoudre des problèmes complexes et de transmettre une information apprise à ses congénères. Aujourd’hui, les chercheurs démontrent qu’il est capable de percevoir le stress de ses congénères et d’utiliser cette information sociale pour éviter de potentiels dangers. Ces résultats sont publiés dans la revue Philosophical Transaction of the Royal Society B.

Le blob est un organisme unicellulaire dépourvu de système nerveux qui habite les sous-bois humides et sombres. Des scientifiques viennent de démontrer que le blob peut détecter le stress de ses congénères. Cette découverte fait suite à une précédente étude qui démontrait que les blobs étaient capables de détecter la présence de leurs congénères dans l’environnement. En effet, lorsqu’ils se nourrissent les blobs excrètent des substances chimiques qui sont attractives pour les blobs qui se situent à proximité et qui sous-tendent leur agrégation.

Les chercheurs se sont demandés si l’attraction des blobs pour leur semblables était indéfectible. La question sous-jacente étant: un blob reste-t-il attiré par un congénère si celui-ci se trouve en mauvaise posture ? L'expérience consiste à déposer des blobs dans une arène expérimentale sur un substrat humide (un gel d’agarose). Un premier groupe de blob est soumis à une source de stress (blobs stressés). Les chercheurs ont testé trois sources de stress différentes : la lumière, l’exposition à une toxine (caféine) ou la privation de nourriture. Un deuxième groupe de blobs est utilisé comme groupe contrôle et ne subit aucun stress (blobs contrôles). Après 24h, lorsque tous les blobs ont exploré l’entièreté du substrat à leur disposition, les chercheurs retirent tous les blobs de leur arènes respectives. On préleve alors les substrats explorés par les blobs stressés et les blobs contrôles et on présente ceux-ci dans une situation de choix à un troisième groupe de blob (blobs tests). Les substrats sont soit placés directement en contact avec les blobs tests soit à 2cm de distance. Les chercheurs ont constaté que les blobs tests évitent systématiquement les substrats qui ont été explorés par des blobs stressés et préfèrent se déplacer sur les substrats explorés par des blobs contrôles et ceci quel que soit la source de stress.

Les résultats de cette étude dévoilent que les blobs sont capables de percevoir indirectement le stress éprouvé par leurs congénères. En évitant de se diriger vers des environnements préalablement explorés par des congénères stressés, le blob évite des situations qui pourraient être potentiellement risquées (exposition à la lumière, poison ou manque de nourriture). Le blob peut ainsi fuir un danger sans avoir à y faire face lui-même. Un avantage, surtout quand on est très lent ! Reste maintenant à découvrir la nature des molécules excrétées dans l’environnement par les blobs stressés. S’agit-il de la même molécule quel que soit le stress ou d’une molécule spécifique à chaque situation ?

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© Audrey Dussutour

Figure : Résumé de l’expérience. Des blobs sont déposés sur un substrat (gel d’agarose) et sont soit soumis à un stress (Blobs stressés : S) ou laissés dans des conditions contrôle (Blobs contrôles : C). Les sources de stress testées sont : la lumière blanche, une toxine ou la privation de nourriture. 24h après, l’ensemble des blobs sont retirés de leurs substrats, et ces substrats sont ensuite présentés à un blob test (T) dans une situation de choix. Ces blobs tests sont ensuite filmés et leurs comportements analysés. Les chercheurs observent alors vers quel substrats les blobs se dirigeaient en premier et quel étaient les substrats qui étaient activement évités.

 

Pour en savoir plus:

Stress signalling in acellular slime moulds and its detection by conspecifics.
Briard L, Gourjade C, Bousquet C,  Dussutour A.

Philosophical Transactions of the Royal Society B. 18 May 2020. doi.org/10.1098/rstb.2019.0470

Contact

Audrey Dussutour
Directrice de recherche
Léa Briard
Post-Doc ANR SMARTCELL

Laboratoires

Centre de Recherche sur la Cognition Animale (CRCA) - Centre de Biologie Integrative (CBI) - (CNRS/Université Paul Sabatier)
Bâtiment 4R3, 118 route de Narbonne, 31062 Toulouse