La tuberculose d’origine zoonotique révélée avec un nouveau test moléculaire

Résultats scientifiques

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A l’origine de 1.6 million de décès annuels dans le monde, la tuberculose représente la première cause de mortalité due à une maladie infectieuse. Les infections d’origine animale sont largement ignorées dans de nombreux pays, faute d’identification spécifique de la bactérie incriminée par les tests diagnostiques standards. Une nouvelle étude met en évidence une prévalence insoupçonnée de ces zoonoses chez des patients au Moyen-Orient, révélée par un test moléculaire de nouvelle génération. Ces travaux, menés en collaboration avec l’Université Libanaise, ont été publiés dans The European Respiratory Journal.

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation (FAO) et d’autres organisations internationales ont appelé à une évaluation mondiale renforcée de la tuberculose humaine d’origine zoonotique, causée par la bactérie Mycobacterium bovis. Sa contribution globale à la tuberculose humaine, autrement principalement due à Mycobacterium tuberculosis, pourrait être sous-estimée, en particulier sur les continents où la charge présumée est la plus lourde, c'est-à-dire en Afrique et en Asie.

Cette étude met en lumière une prévalence précédemment insoupçonnée d’infections à M. bovis chez des patients souffrant de tuberculose au Moyen-Orient. M. bovis cause fréquemment des tuberculoses extrapulmonaires difficiles à diagnostiquer. De plus, cette bactérie est naturellement résistante à la pyrazinamide, un antibiotique essentiel pour le traitement antituberculeux standard de courte durée. Les diagnostics les plus couramment utilisés et approuvés par l'OMS ne détectent pas cette résistance et ne différencient pas M. bovis de M. tuberculosis. Les patients infectés par M. bovis risquent donc de recevoir un traitement inadéquat, avec un impact potentiellement négatif sur son efficacité. Le sous-diagnostic chez l'homme implique également l'existence non détectée d’animaux infectés et d’aliments contaminés, telles des produits laitiers non pasteurisés ou de la viande insuffisamment cuite, représentant des risques de zoonoses échappant aux mesures habituelles de lutte contre la maladie.

Ces travaux montrent l’existence de cas multiples de tuberculose causés par M. bovis, dans une étude couvrant tous les patients rapportés au programme de lutte contre la tuberculose au Liban sur une période de 18 mois. Ces cas ont été révélés grâce à un nouveau test de dépistage moléculaire, appelé Deeplex®-Myc-TB, développé par Genoscreen avec la collaboration de P. Supply. Contrairement aux tests standards, ce test est capable de différencier M. bovis de M. tuberculosis, et de détecter simultanément la résistance à la pyrazinamide, ainsi qu’à douze autres antibiotiques/classes d’antibiotiques, grâce à l’analyse d’un large panel de gènes cibles de ces bactéries. Ces résultats peuvent être obtenus en seulement un à trois jours, au lieu des semaines nécessaires aux tests de culture.

Ce test permettra donc de remédier à la sous-détection de cas de zoonoses, ainsi que des multirésistances aux antibiotiques de nombreuses autres souches de tuberculose, permettant une définition bien plus rapide et plus appropriée du traitement des patients, ainsi qu’un meilleur dépistage des sources d’infection.

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© Genoscreen, Lille

Figure : Identification par le test moléculaire Deeplex®-MycTB d’une souche de M. bovis isolée d’un patient souffrant de tuberculose au Liban. Le secteur en rouge indique une mutation spécifique de M. bovis conférant une antibiorésistance à la pyrazinamide. Au centre, les informations de typage moléculaire identifiant la souche.

Pour en savoir plus :
Zoonotic tuberculosis in humans assessed by next-generation sequencing: an 18-month nationwide study in Lebanon.

El Achkar S, Demanche C, Osman M, Rafei R, Ismail MB, Gaudin C, Duthoy S, De Matos F, Yaacoub H, Pinçon C, Hamze M, Supply P.
Eur Respir J. 2019 Sep 26. pii: 1900513. doi: 10.1183/13993003.00513-2019. [Epub ahead of print] No abstract

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Philip Supply
Directeur de recherche CNRS