Comment le cerveau retrouve son chemin sans fil d’Ariane
Figure : Une double approche, mathématique et expérimentale, révèle l’importance du cervelet et de l’hippocampe pour l’apprentissage et la réalisation de la séquence d’actions orientées vers le but. En rouge sur les figures de droite, les structures clefs© Aurélie Watilliaux, Anne-Lise Paradis et Laure Rondi-Reig

Comment le cerveau retrouve son chemin sans fil d’Ariane

Résultats scientifiques

Retrouver son chemin dans une ville où toutes les rues se ressemblent, c’est comme sortir d'un labyrinthe sans aucun repère : on ne peut compter que sur une connaissance précise du trajet à suivre et des choix à faire à chaque intersection: "prendre à gauche à la première, à droite à la deuxième…". Des chercheurs du laboratoire Neurosciences Paris-Seine, en collaboration avec une équipe de l’Institut des systèmes intelligents et de robotique, ont couplé imagerie cérébrale chez la souris et modélisation mathématique afin de déterminer l’architecture cognitive impliquée dans l’apprentissage d’une telle séquence. Ils ont ainsi identifié le rôle central de l'hippocampe et du cervelet dans la capacité à mémoriser son chemin vers un but lorsque les informations visuelles sont ambiguës Cette étude a été publiée le 19 décembre 2017 dans la revue Scientific Reports.

Dans cette étude alliant expérimentation et modélisation, les chercheurs ont mis au point une tâche dans laquelle des souris devaient trouver la sortie d’un labyrinthe en comptant seulement sur leur capacité à mémoriser une séquence de mouvements : à gauche à la première intersection, à droite à la seconde.

Pour identifier les circuits cérébraux associés à l’apprentissage de cette séquence, les auteurs ont mesuré l’expression de la protéine c-fos (impliquée dans les mécanismes de plasticité synaptique) dans un grand nombre de régions cérébrales : 34 au total. Ils ont ainsi pu analyser dans quelle mesure certaines de ces régions fonctionnaient de concert alors que les souris venaient d’explorer le labyrinthe pour la première fois (exploration) ou qu’elles venaient d’apprendre à rejoindre la sortie en utilisant le chemin le plus court (séquence mémorisée). Ils ont ainsi découvert que l’exploration d’un nouvel environnement implique l’activité conjointe de nombreuses régions cortico-striatales alors qu’une fois la séquence apprise, le réseau se réorganise principalement autour de deux structures : l’hippocampe, connu en particulier pour son rôle dans la mémoire des lieux, mais aussi le cervelet, habituellement cantonné au rôle d’exécutant moteur. 

En testant différents algorithmes pour simuler les performances des souris au cours de leur apprentissage, les chercheurs ont également trouvé un modèle d’apprentissage capable de reproduire le comportement individuel des souris. En extrayant de ce modèle des caractéristiques d’apprentissage spécifiques à chaque souris, les deux équipes ont pu identifier les régions dont l’activité était liée à l’évolution de la performance des souris dans la tâche comportementale. Les résultats révèlent à nouveau une implication significative du cervelet et de l’hippocampe dans l’apprentissage du chemin le plus court.

Ainsi, la convergence des résultats mathématiques et expérimentaux (voir figure) a permis de démontrer que le cervelet et l’hippocampe jouent ensemble un rôle central lorsqu’il s’agit d‘organiser son déplacement spontané en une séquence d'actions orientées vers un but.

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Figure : Une double approche, mathématique et expérimentale, révèle l’importance du cervelet et de l’hippocampe pour l’apprentissage et la réalisation de la séquence d’actions orientées vers le but. En rouge sur les figures de droite, les structures clefs dans l’hippocampe : Corne d’Amon de l’hippocampe, partie dorsale (dCA1, dCA3) ou ventrale (vCA3) ; et dans le cervelet : lobule (Lob) IV/V et noyaux fastigial (Fast N) et denté (Dent N).
© Aurélie Watilliaux, Anne-Lise Paradis et Laure Rondi-Reig

 

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